La Tunisie adopte une loi historique pour mettre fin à la violence envers les femmes

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Tunisia’s parliament, pictured above in a 2016 file photo, voted last week on the country's first law to combat domestic violence.  Photo: Khaled Nasraoui
Photo: Khaled Nasraoui

C’est un mercredi 26 juillet historique que les tunisiennes et les tunisiens ont vécu et ce grâce à l’adoption, tant attendue, d’une loi contre les violences faites aux femmes. Votée à l’unanimité par l’Assemblée des Représentants du Peuple (avec 146 voix sur 217 élus et zéro abstention), la loi contre les violences faites aux femmes adopte une approche intégrale qui permet de responsabiliser l’ensemble des secteurs concernés dans des efforts concertés de prévention, de prise en charge et de réponse aux violences faites aux femmes.

« Je suis très fière en tant que tunisienne et en tant que femme d’abord que cette loi ait été adoptée.  Aujourd’hui, c’est l’apothéose après le Code du statut personnel initié en 1959 » a déclaré Naziha Labidi, Ministre de la Femme, de la Famille et de l’Enfance.

Cette  nouvelle loi contre la violence faite aux femmes adopte une définition large de la violence et englobe ses différentes formes. En effet, en plus des violences physiques, cette loi reconnait également les autres types de violences faites aux femmes notamment économiques, sexuelles, politiques et psychologiques. Le texte prévoit également de nouveaux mécanismes de protection qui devront assurer aux victimes l’accès aux services nécessaires ainsi qu’une assistance juridique et psychologique. Enfin, des dispositions ont été intégrées pour éliminer l’impunité des auteurs des actes de violences, en modifiant notamment l’article 227 du code pénal relatif à l’abandon des poursuites contre l’auteur d’un acte sexuel avec une mineure au cas où l’agresseur épouse sa victime.

Cet aboutissement vient consacrer les efforts de plaidoyer de plusieurs années, menés par une société civile très engagée, les institutions nationales et avec une fructueuse collaboration avec plusieurs organisations internationales  dont ONU Femmes. Avant l’adoption de cette loi, le Code du Statut personnel de 1956 était la seule législation progressive en son genre, aboutissant à l’abolition de la polygamie ainsi qu’à l’établissement de l’âge minimal pour le mariage. D’autre part, le Code de (1956) a introduit le consentement mutuel des deux partis comme condition pour le mariage, et a créé une procédure judiciaire pour le divorce. En alignement avec son mandat normatif pour l’accélération des progrès en matière des droits des femmes, ONU Femmes a contribué, depuis 2014, à l’élaboration du premier projet et a poursuivi son soutien technique et de plaidoyer tout au long des étapes de revues du projet de loi en formulant des recommandations et en participant à l'analyse conjointe du Groupe Plaidoyer Organisations Internationales (Conseil de l’Europe, PNUD, HCDH, ONU Femmes, UNFPA, UNODC, Union européenne). Les outils de plaidoyer destinés aux parlementaires ont consisté en l’élaboration d’un guide sur les normes internationales de lutte contre la violence faite aux femmes ainsi qu’un argumentaire, article par article, présenté conjointement par les Nations Unies devant les membres de l'Assemblée des Représentants du Peuple.

Since 2014, UN Women has contributed to the review and finalization of the law on ending violence against women and provided recommendations, together with other international and UN partners, such as the Council of Europe and the European Union, UNDP, OHCHR, UNFPA and UNODC. UN Women also supported the development of advocacy tools, including a guidance for parliamentarians on the international standards to combat violence against women and an article-by-article analysis of the draft law which was then submitted by the UN System to the Assembly of People's Representatives (Tunisian parliament).

Citant l’enquête nationale sur la violence à l’égard des femmes en 2010 qui estime que 50% des femmes tunisiennes ont été victimes, à un moment de leur vie, de violence, Bochra Belhaj Hmida, députée au sein de l’ARP, a déclaré : « C’est pour cette raison que la mise en place d’un cadre légal luttant contre la violence a été nécessaire ». Elle souligne toutefois l’importance de l’éducation au sein de la famille et dès le plus jeune âge pour prévenir les violences.

« ONU Femmes Maghreb est fière d’avoir contribué à cette réussite et ce depuis l’élaboration du texte de loi en 2014, jusqu’aux débats qui s’en sont ensuivis. . Cette loi marque donc un grand pas vers de la réalisation de l’égalité des sexes en Tunisie », a déclaré Leila Rhiwi, Représentante d’ONU Femmes Maghreb. « J’aimerais  saluer   la mobilisation et la persévérance de la société civile tunisienne  avec laquelle nous avons  construit des partenariats durables et mené des dialogues constructifs , facteurs clé pour  de ce succès ».

La loi tunisienne doit désormais se concrétiser en mesures d’application. Rappelons à cet effet que, dans le cadre du projet « création de mécanismes intersectoriels pour la prise en charge des femmes victimes de violences dans le grand Tunis 2014-2017 », mis en œuvre par l’Office National de la Famille et de la Population et le Ministère de la femme, de la famille et de l’Enfance et ONU Femmes Maghreb, 5 Ministères tunisiens ont adopté et signé des protocoles sectoriels pour la prise en charge des femmes victimes de violence en décembre 2016. Ces protocoles constituent un ensemble de mécanismes visant à améliorer la coordination entre les différents départements responsables desdits services  , qui et organiser  les méthodes d’intervention en matière de  prise en charge des femmes victimes de violence. Les cinq secteurs impliqués dans les protocoles sont : les Affaires Sociales, la Justice, la Femme Famille et Enfance, l’Intérieur et la Santé, et leurs représentants se réunissent mensuellement pour assurer le suivi et l’évaluation des situations individuelles des femmes.