Au Kenya, l’accès à une technologie nouvelle permet aux productrices de mangues de compenser leurs pertes après récolte

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Teresia Kawira examines the mangoes in her farm. She often loses a lot of her crop in the absence of adequate facilities to process and preserve the fruit. Photo UN Women Africa
Teresa Kawira examinant les mangues de son exploitation. Elle perd souvent une grande partie de sa récolte du fait qu’elle ne dispose pas des équipements nécessaires à la transformation et à la conservation des fruits. Photo: ONU Femmes Afrique

C’est la saison des mangues dans les comtés de Meru et de Makueni, dans l’est du Kenya. Les arbres sont chargés de fruits, le parfum sucré des mangues mûres embaume les vergers. Selon l’Institut de recherche agricole du Kenya, les producteurs de mangues perdent souvent 40 à 45 pour cent de leur récolte, malgré l’explosion de la demande au Kenya et sur les marchés régionaux. Ce sont principalement les mauvaises techniques de récolte et de conditionnement après récolte qui en sont la cause, outre les ravageurs et les maladies.

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Cependant, cette année, Teresa Kawira, agricultrice de 45 ans et mère de sept enfants, est pleine d’espoir. Elle vient tout juste de terminer une formation de trois jours, soutenue par ONU Femmes, sur les techniques de conditionnement après récolte et de transformation des fruits grâce à l’utilisation d’une nouvelle machine de transformation multi-aliments. Ce type de machine peut transformer 7,8 tonnes de mangues toutes les six heures et peut également servir à la transformation d’autres fruits.

« Pour nous, les agricultrices, notre principal défi réside dans le pourrissement des mangues sur les arbres », explique Mme Kawira. « C’est la conséquence directe de la surabondance de mangues et de l’insuffisance de moyens technologiques pour nous aider à produire d’autres produits à partir des mangues que nous récoltons ».

Comme pour beaucoup d’agricultrices de la région, les journées de travail de Mme Kawira sont longues, et elle assume de nombreuses responsabilités. Elle se réjouit à l’idée de pouvoir générer des revenus complémentaires à partir de sa production de mangues.

Ce projet de formation, qui a été mené en collaboration avec l’Université Jomo Kenyatta d’Agriculture et de Technologie (JKUAT), l’Institut de Stockholm pour l’environnement (SEI) et Techno Serve, et a bénéficié du soutien financier de la Fondation Rockefeller, a formé 100 agriculteurs – dont la moitié sont des femmes – des comtés de Meru, de Makueni et de Tana River sur les techniques de transformation et de conditionnement des fruits, ainsi que sur les stratégies de marque.

Ce projet a récemment réuni 30 groupes d’agriculteurs dans le comté de Meru à l’occasion d’une compétition sans merci où une machine de transformation multi-aliments a été décernée au Groupe Chaaria. Parmi les critères de sélection du gagnant figuraient la représentation des femmes dans le groupe et son leadership, l’accès à l’eau et à l’électricité pour opérer la machine, ainsi que la présence d’un justificatif d’enregistrement de sa coopérative.

« Nous sommes tellement contents d’avoir gagné cette machine. Nous sommes certains que si nous l’utilisons régulièrement, nos conditions de vie s’amélioreront », a déclaré Marisela Mwiti, membre du Groupe Chaaria.

Pour les autres groupes participants, l’expérience s’est avérée enrichissante et leur a permis d’acquérir de nouvelles compétences. Certains prévoient déjà de collaborer entre eux dans le but de partager une machine. Les gouvernements locaux ont également promis de soutenir les groupes d’agriculteurs dans l’acquisition de telles machines.

Fridah Kawira gets ready to attend one of the training sessions on post-harvest technologies led by UN Women and partners in Meru County. Photo/ UN Women Africa
Fridah Kariwa se prépare à assister à l’une des séances de formation sur les technologies après récolte menées par ONU Femmes et ses partenaires du comté de Meru. Photo: ONU Femmes Afrique

« Grâce à cette technologie, j’espère que les pertes de mangues appartiendront désormais au passé », a souligné Fridah Kawira, membre du groupe des producteurs de mangues de Kathangari. « Depuis que j’ai rejoint ce groupe, ma vie s’est beaucoup améliorée », précise-t-elle en faisant allusion au groupe d’entraide dont elle fait partie. « J’ai réussi à acheter une vache qui produit du lait que je vends et que ma famille consomme. L’argent que j’en tire sert à payer les frais de scolarité de mes enfants. Je peux vraiment dire que les mangues ont aidé à donner une éducation à mes enfants ! ».

Pour de nombreuses agricultrices, l’apprentissage des techniques de transformation, de conservation et de commercialisation de divers produits créés à partir de mangues fraîches a été une véritable révélation. Stella Musyoka, agricultrice de 48 ans et membre du groupe Kyeni Kya Yathonza du comté de Makueni, a indiqué : « Grâce à cette formation, j’ai appris à faire de la confiture et du jus de fruits. Je pourrai plus facilement me lancer dans la fabrication du yaourt puisque je possède à la fois les mangues et les vaches qui produisent du lait pour ma famille. Je serai en mesure d’obtenir les fonds nécessaires grâce à l’initiative d’épargne et d’investissement collectif (« table banking ») disponible dans notre groupe ».

Kiraitu Murungi, Governor Meru County inspects the fruit processing technology and is briefed by Jomo Kenyatta University of Agriculture and Technology (JKUAT) engineers led by professor David Sila. Photo: UN Women/Faith Bwibo
Kiraitu Murungi, gouverneur du comté de Meru, examine la machine de transformation de fruits lors d’une séance d’information menée par les ingénieurs de l’Université Jomo Kenyatta d’Agriculture et de Technologie (JKUAT), sous la direction du professeur David Sila. Photo: ONU Femmes/Faith Bwibo

Le concept de « table banking » correspond à une stratégie collective de financement à laquelle les petits groupes d’épargne et de prêt ont généralement recours. Les membres du groupe placent leurs économies dans un fonds commun qui peut ensuite être utilisé pour octroyer de petits prêts destinés au financement de projets spécifiques.

« Au Kenya, une proportion considérable de femmes travaille dans le secteur agricole. Bien qu’elles s’investissent autant que les hommes, elles n’ont souvent pas accès aux ressources financières et technologiques nécessaires à l’amélioration de leurs moyens de subsistance. C’est pourquoi ONU Femmes est entrée en partenariat avec les universités, afin que les agricultrices puissent avoir accès à cette technologie », a déclaré Fatmata Sessay, conseillère en politique régionale en matière d’agriculture climato-intelligente pour ONU Femmes.

Avec la poursuite de la hausse de la production de mangues au Kenya, l’accès aux technologies nouvelles et existantes s’avère essentiel pour maintenir et améliorer la productivité. ONU Femmes encourage une collaboration entre les universités, les instituts de recherche et les partenaires du secteur privé au Kenya afin de s’assurer que les agricultrices ne sont pas laissées pour compte à mesure des avancées technologiques.