Comment des hommes sont devenus des champions de la lutte contre la violence basée sur le genre en Ouganda
« En tant qu’ambassadeur masculin de la lutte contre la violence à l’égard des femmes, je m’efforce d’œuvrer à leur inclusion et de veiller à ce que la parité entre les sexes soit une priorité », déclare Wilfred Nyeko, agent de développement communautaire du gouvernement local. « Les champions masculins de la cause se doivent de signaler toute forme d’abus, de devenir eux-mêmes une source de changement et d’inspiration pour les hommes, et d’être un modèle pour le changement de mentalité. Cela signifie également défendre les droits des femmes et des filles, et travailler pour accroître leur visibilité dans la société. »
Nyeko est l’un des 15 hommes du district de Kitgum qui ont participé aux séances de formation sur l’égalité de genre, les droits des femmes et l’éradication de la violence basée sur le genre, soutenues par l’Initiative Spotlight en 2019 et 2020 et organisées par LandNet Uganda, un partenaire d’ONU Femmes.
« En Ouganda, il existe des préjugés sexistes dans l’éducation, des disparités entre les sexes dans l’agriculture, un écart de rémunération entre les hommes et les femmes, un manque de représentation des femmes et des filles au niveau politique, et des incidences élevées de harcèlement sexuel », explique M. Nyeko. « En tant que champion masculin de la cause, je me dois d’utiliser mon autorité au sein de la communauté pour créer une culture plus inclusive et promouvoir la réduction de la violence au sein de ma société. »
Au cours des séances de formation, Wilfred Nyeko et les autres porte-drapeaux masculins de la cause ont étudié le rôle des droits des femmes dans la réduction de la violence basée sur le genre ; l’importance des services de planification familiale pour les femmes et la façon d’encourager les hommes à découvrir ces services avec leurs femmes ; les techniques de parentalité positive qui favorisent l’égalité entre les sexes ; et les comportements sexuels sûrs qui promeuvent l’autonomie corporelle et le pouvoir d’action des femmes. Les ambassadeurs de la cause ont pu acquérir les compétences nécessaires pour servir de modèles et d’agents de changement pour les autres hommes dans leurs communautés. On a pu observer que le nombre de situations conflictuelles a diminué dans les districts ciblés par les formations.
La fracture foncière
Il existe des liens clairs entre les droits fonciers et l’accès à la terre des femmes et la violence basée sur le genre en Ouganda. Dans le district de Kitgum, 63 pour cent des femmes possèdent des terres et 86 pour cent des femmes ont accès à la terre, mais dans les régimes fonciers coutumiers, ces droits légaux ne sont souvent pas reconnus dans les communautés où les hommes dominent la prise de décision, et les femmes sont exclues de toute participation significative aux systèmes de gouvernance.
« En général, les femmes doivent attendre que leur mari prenne les décisions concernant la gestion des terres et l’accès à celles-ci, ce qui fait que de nombreuses femmes rurales sont sous-employées et n’ont aucun contrôle sur les ressources productives et les services », remarque Evelyn Letiyo, spécialiste du programme « Élimination de la violence à l’égard des femmes et des filles » d’ONU Femmes Ouganda, « ce qui signifie qu’en cas de violence domestique, les femmes ont souvent le sentiment qu’elles n’ont pas d’autre choix que de rester dans leurs foyers violents car elles n’ont aucun moyen de subvenir à leurs besoins ou à ceux de leurs enfants. »
En outre, près de 50 pour cent des habitants du nord de l’Ouganda ont connu des conflits fonciers – la majorité étant des femmes et des veuves – et 72 pour cent de ces conflits se produisent au sein des foyers, des familles et des clans. Souvent, ces conflits fonciers peuvent engendrer des violences économiques et physiques perpétrées à l’encontre des femmes et des filles.
Outre le fait de former des défenseurs masculins de l’égalité entre les sexes dans leurs communautés, LandNet Uganda a organisé des réunions et des forums de sensibilisation avec 2 206 membres communautaires pour faire connaître les droits fonciers des femmes, augmenter leur niveau de participation à la prise de décisions et à la gouvernance, et les aider à comprendre quels sont les services à leur disposition si elle subissent des violences.
« Depuis les réunions communautaires, 25 femmes participent dorénavant à la prise de décision sur les droits et l’utilisation des terres, et elles sont désormais plus nombreuses à signaler les problèmes fonciers aux autorités compétentes. L’accès à la terre par les femmes aux fins de production s’est considérablement amélioré », s’enthousiasme M. Nyeko.
« Il est important de noter que les incidents de violence basée sur le genre sont maintenant signalés et traités par la police et les autorités. Les compétences en matière de copromotion et de médiation que nous avons acquises en tant que champions nous ont aidés à gérer les conflits fonciers et les signalements de violence bien mieux qu’auparavant. En fin de compte, je veux que les hommes sachent que nous devons coexister pacifiquement avec les femmes dans notre société. »