Michelle Bachelet intervient devant le Congrès des députés espagnols

Date:

Discours prononcé par la Directrice exécutive d'ONU Femmes, Michelle Bachelet, devant le Congrès des députés à Madrid, le 30 mai 2011.

[Vérifier à l'écoute.]

Président du Congrès des députés,

Mesdames et Messieurs, Présidents des Commissions de la Coopération et de l'Egalité du Congrès des députés et du Sénat,

Mesdames et Messieurs, Membres du Parlement, Sénateurs.

Je souhaiterais commencer mes remarques en vous remerciant de l'opportunité que vous me donnez, en ma capacité de Directrice exécutive d'ONU Femmes de vous faire partager certaines de mes réflexions concernant les immenses défis auxquels nos sociétés sont confrontées au moment où elles s'attachent à mener à bien des politiques inclusives et participatives, qui sont le préalable à des démocraties solides et vigoureuses.

Une inclusion et une participation qui, en ce qui me concerne - et en vertu du mandat des Nations Unies - sont centrées principalement sur les femmes : les jeunes femmes, les filles, les professionnelles, les travailleuses, les mères, les femmes gées, les femmes indigènes, les chômeuses, les immigrées. Toutes sans exception cherchent à mener une vie sans violence et à ne plus être victimes d'abus constants ; elles veulent que l'on compte avec elles, comme jamais auparavant dans l'histoire, et affirment leurs droits à être les capitaines de leurs propres navires et des actrices clés du progrès de leurs communautés et de leurs propres pays.

Et ce matin, je veux tout d'abord adresser aux citoyens espagnols - par votre intermédiaire, en tant que représentants - toute notre gratitude pour les inlassables efforts que vous déployez pour soutenir notre mission, qui vise à l'autonomisation des femmes et à l'égalité des sexes. Mais il est tout aussi important de faire preuve de responsabilité au niveau de l'utilisation et de l'orientation des ressources économiques qui ont été données par la coopération espagnole pour réaliser notre tche.

La société espagnole, dans sa totalité, s'attache à apporter son aide et à travailler avec d'autres pays, ce qui la place dans une catégorie à part.

Il n'est pas facile de maintenir son aide internationale lorsqu'une crise économique de l'envergure que nous connaissons, qui continue d'impacter de nombreuses économies mondiales, vous frappe.

Mesdames et Messieurs, l'Espagne a maintenu son engagement envers la communauté internationale via la coopération pendant les périodes faciles et difficiles, et elle l'a fait de manière intersectorielle, appuyée par toutes les parties prenantes politiques et avec l'encouragement légitime des citoyens et des citoyennes.

J'ai lu un sondage qui indique que cette année, 67% des citoyens espagnols continuent de penser que l'Espagne doit coopérer au niveau international en vue d'aider à résoudre les problèmes auxquels sont confrontés les pays les moins développés, même si cela implique des coûts. C'est une réponse qu'on ne trouverait pas dans beaucoup de sociétés, et qui mérite tout notre respect, reconnaissance et gratitude, démontrant le principe de solidarité auquel est attachée la société espagnole.

Il ne fait aucun doute que vous avez de grandes réserves d'engagement en faveur de l'investissement orienté sur le social.

Je me trouve ici aujourd'hui pour vous présenter les résultats accomplis et nos aspirations, pour vous montrer que nous nous portons responsables devant vous de l'efficacité de notre travail, ainsi que pour continuer à maintenir une relation stratégique avec l'Espagne au niveau de l'égalité des sexes et de l'autonomisation de la femme dans le monde.

Le 2 juillet 2010, l'Assemblée générale a unanimement adopté une résolution historique qui a créé l'Entité des Nations Unies pour l'égalité des sexes et l'autonomisation de la femme, ONU Femmes. En qualité de Directrice exécutive et Secrétaire générale adjointe, on a fait appel à moi afin que nous réalisions de grandes avancées au niveau de la recherche des moyens de protéger et de promouvoir les droits des femmes et des filles dans le monde entier.

Nous n'avons pas commencé notre travail de zéro. Nous avons derrière nous des années d'expérience accumulées par des organisations des Nations Unies telles que le Fonds de développement des Nations Unies pour la femme (UNIFEM), l'Institut international de recherche et de formation pour la promotion de la femme (INSTRAW) et le Bureau de la Conseillère spéciale pour la problématique hommes-femmes et la promotion de la femme (OSAGI), sans compter le travail inlassable de milliers d'organisations sociales issues de pays de toute la planète.

ONU Femmes a le mandat de travailler et de jouer un rôle visible tant dans les pays en développement que dans ceux qui sont déjà développés. Nous avons le devoir de travailler avec chacun d'entre eux.

Mesdames et Messieurs, nous sommes également des collaborateurs essentiels pour réaliser l'autonomisation des femmes en Espagne, à Bruxelles, en Bolivie, en Egypte, au Nigéria ou aux Philippines, pour ne citer que quelques pays.

Les priorités stratégiques que nous avons définies pour ONU Femmes incluent l'autonomisation économique, le leadership et la participation politiques des femmes, l'éradication de la violence, la défense des droits de la femme dans les situations conflictuelles et postconflictuelles, et l'inclusion de l'égalité des sexes dans la planification nationale du développement de nos pays.

Réaliser ces objectifs est une question de justice, mais aussi une politique avisée pour améliorer la qualité de nos démocraties, la qualité de vie, l'Etat-providence et la création de richesse. Le fait d'éliminer les inégalités sexuelles permet d'éliminer les autres types d'inégalités. L'autonomisation des femmes et l'égalité des sexes n'est pas une politique sectorielle mais une politique globale qui doit guider d'autres types de politiques et est la pierre angulaire de tout type d'ordre du jour politique, indépendamment de l'idéologie. L'égalité des sexes est une politique de l'Etat qui appelle à un large consensus entre les forces politiques, une feuille de route pour le développement et une force de changement structurel irrévocable dans les sociétés.

Car quand nous parlons de l'autonomisation économique des femmes, nous parlons d'une augmentation du revenu par habitant, de meilleurs résultats dans le cas des entreprises qui comptent davantage de femmes au sein de leurs conseils d'administration (étude de Fortune 500 de 2007), de l'accès au crédit et aux autres biens et d'une meilleure formation. Nous faisons référence, par essence, à de meilleurs avantages pour les femmes, à moins de mortalité maternelle, à moins de mortalité infantile, à une meilleure nutrition des enfants, à moins de risque de VIH et à une plus grande sécurité alimentaire. On peut sans aucun doute affirmer que lorsque les femmes se trouvent autonomisées, c'est la communauté dans son ensemble qui l'est.

Nous savons que lorsque les institutions comptent davantage de femmes, on bénéficie d'une meilleure représentation, d'une transparence accrue et de meilleurs systèmes de responsabilité. Notre tche consiste donc à renforcer la démocratie, à assurer que nos systèmes politiques représentent les hommes et les femmes d'une manière réelle, traitent de leurs problèmes et le font d'une manière participative. Le débat, les idées et les les actions doivent fournir un cadre pour nos performances.

La violence est toutefois la pandémie qui tue le plus de femmes dans le monde. Les femmes meurent des mains de leurs fiancés et maris, ex-fiancés et ex-maris, elles sont utilisées comme des armes, elles sont violées en guise de récompense, elles se voient donner un prix ou sont vendues, ou bien elles font l'objet de la traite d'esclaves.

Nous sommes confrontés à de nombreux défis, l'un d'entre eux étant d'assurer l'autonomisation des femmes dans le domaine de la participation politique. Nous assistons à cela aujourd'hui dans les pays où le « printemps arabe » se développe. En Tunisie et en Egypte, mais aussi dans d'autres pays de la région où les femmes sortent dans la rue pour exiger la liberté, la citoyenneté et la justice sociale, ONU Femmes travaille à assurer que les femmes de tous ces pays puissent devenir des citoyennes à part entière, exercer leurs droits et participer également activement aux transitions, aux changements constitutionnels et aux institutions.

A cette fin, nous travaillons avec la société civile de ces pays et avec les mouvements de femmes au niveau local, nous échangeons des expériences sud-sud au niveau de la transition sociétale du type observé en Espagne ou au Chili, et nous collaborons également avec la communauté internationale pour appuyer les initiatives que les citoyens et les citoyennes de ces pays peuvent décider de mettre en œuvre au fil du temps.

Un bon exemple en est l'atelier que nous avons organisé vendredi dernier ici en Espagne, avec les personnes responsables de l'aide à l'étranger espagnole pour les pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient et avec les représentants d'ONU Femmes dans ces pays, en vue de renforcer notre efficacité et d'appuyer les femmes de toute la région.

On nous demandera de quelle manière nous allons parvenir à ces objectifs, comment nous allons travailler avec la cohésion nécessaire au sein du système des Nations Unies, de manière à ne pas dupliquer les efforts entre les agences, quelles seront les relations entre la coopération multilatérale et la coopération bilatérale pour ce qui concerne spécifiquement l'Espagne, et quelles seront les ressources minimum, en termes matériel et humain, que nous devrons avancer dans le cadre de ce grand élan en avant au niveau de l'égalité des sexes, qui a laissé une telle marque indélébile sur tant d'hommes et de femmes dans le monde entier, et notamment sur ceux d'entre nous qui travaillent dans le domaine des droits de l'homme.

Pour ce qui concerne le budget des Nations Unies, nous avons estimé que le minimum à recueillir est de 500 millions de dollars E.U. pour 2013. Dans cette tche, nous sommes engagés en tant qu'équipe, sachant que ce faisant, nous bénéficions de l'aide des institutions, des entreprises et de la société civile. Mais c'est un travail en cours, et dont l'objectif n'est pas aisé.

Avant de continuer, je souhaiterais saluer le travail d'une femme espagnole, Inés Alberdi, Directrice de l'UNIFEM de 2008 jusqu'à la création d'ONU Femmes. Au cours de ces années, on a assisté à une croissance significative des programmes, dans des domaines tels que l'autonomisation économique et politique et la lutte contre la violence, couvrant de nombreuses zones géographiques supplémentaires.

J'évoquerai maintenant les contributions de l'Espagne et leurs résultats :

Les contributions de l'Espagne à ce qui était UNIFEM ont commencé il y a plusieurs années, augmentant graduellement jusqu'à ce que ce pays devienne le principal donateur de l'UNIFEM en 2008. L'année suivante, l'accord stratégique sur trois ans (2010-2012) a été signé, pour une valeur de 95 millions d'euros. Son objectif a été de renforcer la fonction et les capacités stratégiques d'ONU Femme pour ce qui est d'aider les pays et le système des Nations Unies à intégrer les objectifs de l'égalité des sexes, dans le cadre des principes de la Déclaration de Paris et du Programme d'action d'Accra.

L'Accord se concentre sur les priorités stratégiques partagées suivantes :

  • Réduire la féminisation de la pauvreté et l'exclusion des femmes grce à l'amélioration de leur sécurité et de leurs droits écononomiques.
  • Réduire les taux de violence contre les femmes et les filles.
  • Réaliser l'égalité des sexes en matière de gouvernance démocratique, grce à l'appui au leadership des femmes en matière de gestion publique et d'initiatives de rétablissement de la paix dans les régions conflictuelles et postconflictuelles.

Si nous avons travaillé dans diverses régions géographiques, nous nous sommes clairement concentrés sur les programmes en direction de l'Amérique latine, et je vous remercie particulièrement au nom de ma région bien aimée.

Mesdames et Messieurs, je souhaiterais également souligner qu'ONU Femmes se classe à la 11ème place au niveau des contributions apportées par l'aide à l'étranger espagnole par rapport à d'autres agences du système, que ce soit le PNUD (9,7%), L'UNICEF (5,8%), la FIDA (3,4%) et le PAM (3,3%) ; nous recevons environ 2,5% de la contribution multilatérale de l'Espagne.

Nous désirons générer un changement culturel, changer les pratiques et les comportements qui, souvent, sont profondément enracinés dans notre société. Ce n'est pas une tche facile, et ses résultats ne sont pas visibles sur le court terme.

Mais nous assistons aujourd'hui à des changements tangibles dans le monde, et des résultats spécifiques découlent de ces contributions. A titre d'exemple, 140 pays ont adopté des lois contre la violence sexuelle et 103 pays comptent des lois contre le harcèlement sexuel. Il existe des lois en faveur de l'égalité des sexes dans 67 pays et c'est dans le domaine de la participation politique des femmes où nous sommes le mieux à même d'évaluer ces améliorations.

En 20 ans, entre 1975 et 1995, le taux d'augmentation du nombre de femmes au sein des parlements du monde entier a été de seulement 1%. Entre 1995 et 2009, ce pourcentage a augmenté, passant de 11,6% à 19%. L'augmentation a été importante, mais elle l'a été toutefois moins que ce qu'exigent nos sociétés et communautés.

A ce stade, je souhaiterais brièvement vous parler de certaines des réalisations majeures que nous avons accomplies en tant qu'ONU Femmes au cours des deux dernières années.

Nous mettons en œuvre le Programme mondial des villes sûres pour les femmes et les filles avec HABITAT (Nations Unies) qui couvre pour l'heure cinq villes : Quito (Equateur), le Caire (Egypte), New Delhi (Inde), Port Moresby (Papouasie-Nouvelle Guinée) et Kigali (Rwanda). L'objectif du programme est de générer un modèle qui peut être reproduit par les conseils municipaux et les municipalités autour du monde, afin de réduire le harcèlement et les agressions sexuelles dans les espaces publics. La conception de l'évaluation de l'impact de ce programme a été menée à bien et établie comme l'un des objectifs du nouveau Plan stratégique qui peut être reproduit dans 35 pays.

Nous mettons en place une plateforme Internet avec un Centre virtuel de l'expertise, en vue de mettre fin à la violence contre les femmes et les filles. La plateforme est la seule de son type et rassemble les stratégies les plus efficaces et les connaissances qui ont été tirées de l'expérience de dvers pays, et est à la disposition des réseaux d'ONG, des médias, des centres de recherche, des législatures et du public en général.

Le Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour soutenir les actions visant à éliminer la violence contre les femmes canalisé des ressources techniques et financières vers les gouvernements et les organisations de la société civile, et nous a permis, depuis 1996, d'appuyer 317 programmes dans 124 pays et territoires avec 60 millions de dollars E.U..

En ce qui concerne l'autonomisation économique à laquelle nous nous attaquons par le biais des travailleurs domestiques, les femmes qui ont des emplois informels, les femmes migrantes et leurs contributions à l'économie, avec la production d'indicateurs ventilés par sexe, race et ethnicité, cette information fournit les données nécessaires pour générer des programmes ou des politiques publiques relatifs à cette situation.

Je veux en particulier mentionner le Fonds pour l'égalité des sexes, dont le principal donateur est l'Espagne, et qui a entamé sa première année de fonctionnement avec un objectif défini : appuyer les projets de la société civile qui visent à l'autonomisation économique et politique des femmes dans le monde.

Nous avons diffusé l'appel à expression d'intérêt en cing langues et par le biais d'une plateforme numérique, et je peux vous indiquer que la demande a dépassé le capital disponible, qui est de 69 millions de dollars E.U.. Nous avons reçu plus de 1.200 demandes, pour un montant de 3 milliards de dollars E.U., et 127 pays ont participé.

Mesdames et Messieurs les parlementaires, ce succès est sans précédent. En vue de réaliser une évaluation juste et transparente de si nombreuses propositions, un processus ouvert a été lancé, en vertu duquel 39 experts de l'égalité des sexes de toutes les régions du monde ont évalué les offres conformément à des critères empiriques.

Suite à cette procédure, au cours du premier cycle de subventions, le Fonds a permis de fournir 37,5 millions de dollars E.U. pour élaborer 40 programmes dans 35 pays. Parmi les exemples :

Au Libéria, plus de 9.000 Libériens et leurs familles pourront s'appuyer sur une source fiable de revenu dans une telle mesure que leurs marchés sont réactivés dans des marchés dans une période de quatre ans. En Egypte, au Brésil, aux Philippines et au Cameroun, le travail sera mené à bien en vue d'assurer que les travailleurs domestiques et les femmes qui sont employés dans le secteur informel peuvent s'organiser, et pour assurer que leurs contributions économiques et les droits du travail sont reconnus.

Au Maroc, les femmes qui vivent dans 13 communautés des oasis sont en train de gagner leur indépendance et d'obtenir une source de revenu grce à des coopératives bien conçues. Au Ghana, les militantes en faveur des droits des femmes ont constitué la seule coalition qui participe en tant qu'organisation d'experts au traitement des questions d'égalité des sexes au sein du Comité national du Ghana sur les changements climatiques.

En Bosnie-Herzégovine, 180 jeunes femmes ont acquis des compétences de leadership pour la négociation, les relations publiques et les campagnes en faveur de l'égalité des sexes. En Chine, les femmes de trois provinces rurales ont demandé un siège à la table du forum public et demandé la mise en place de formations pour les candidates, en vue de promouvoir une meilleure participation des femmes aux processus gouvernementaux de prise de décisions. Au Sri-Lanka, grce à des efforts considérables déployés au niveau multimédia, les femmes des minorités ethniques ont été formées pour pouvoir présenter leur candidature aux prochaines élections.

Le programme en Afghanistan se concentre sur le droit des femmes à la propriété et à l'héritage. Dans les Territoires palestiniens occupés, six coopératives communautaires ont travaillé à affirmer leurs droits économiques et politiques. Le Programme du Mexique appuie la gestion des femmes au sein de l'une des associations agricoles rurales.

Il ne s'agit que de quelques exemples qui donnent un aperçu de ce dont nous parlons lors que nous évoquons l'appui à l'autonomisation de la femme dans les domaines économiques et politiques.

Une question doit toutefois être encore améliorée et constitue l'un des défis qui se posent à cette nouvelle organisation qu'est ONU Femmes : les mécanismes de contrôle et d'évaluation.

Nous voulons donner la priorité à l'évaluation de ce que nous faisons ; nous voulons qu'une analyse rigoureuse soit faite par des experts afin d'étudier ce qui fonctionne et permet de faire des progrès au niveau de l'égalité des sexes, ce qui doit être reproduit et amélioré, et ce qui doit changer en vue d'avoir un impact plus important.

C'est une préoccupation partagée par tous ceux qui se préoccupent de l'égalité des sexes au niveau de la politique intérieure et de la politique de coopération, sachant qu'il est de la plus haute importance de déterminer quels programmes et mesures ont le plus grand et le meilleur impact.

Nous avons élaboré et diffusé 8 documents comportant des évaluations internes, et dont les résultats sont consultables par le public, en gage de notre transparence. Ces évaluations sont pour nous un signe des importantes conclusions qui serviront dans le même temps à orienter nos efforts dans l'avenir ; je souhaiterais ici mettre en exergue quatre facteurs clés :

1. Les évaluations concluent que l'action de l'organisation a été importante pour ce qui est de répondre aux besoins nationaux, et efficace pour ce qui est de contribuer à élaborer et à adopter des cadres de régulation nationaux dans des domaines tels que l'élimination de la violence sexuelle ou en ce qui concerne les droits de propriété ; mais elles démontrent qu'il existe toujours des lacunes dans l'application ou la mise en œuvre de ces lois, qui entravent les efforts visant à garantir une égalité significative, ce qui fait que des mesures spécifiques sont nécessaires ;

2. Elles montrent que l'organisation a été efficace pour ce qui est de renforcer les capacités au niveau macro au sein des institutions elles-mêmes, et la même chose s'applique aux organisations de femmes et aux collectifs de femmes au niveau de la communauté ; ONU Femmes a également été efficace pour ce qui est de créer des forums de dialogue entre la société civile et les gouvernements, ainsi que d'instaurer des mécanismes de responsabilité ; néanmoins, nous devons générer des stratégies à plus long terme pour le renforcement des capacités;

3. Elles indiquent que les changements entraînés par les programmes soulèvent de sérieuses questions de durabilité, un défi qui est courant dans les politiques sociales, et que, dans la plupart des cas, elles exigent un appui technique et une durabilité financière ; et enfin,

4. Elles révêlent des faits concernant le besoin d'améliorer les outils disponibles pour mesurer les progrès réalisés au niveau de l'égalité des sexes et de l'autonomisation des femmes, qui montrent les changements sur le moyen et long termes, ainsi que les progrès accomplis au niveau du renforcement de nos capacités domestiques pour réaliser des avancées dans ces domaines.

Mesdames et Messieurs, peut-être pensez-vous que j'ai consacré beaucoup de temps au passé dans mes remarques, mais nous voulons que vous soyez convaincus que nous serons responsables et agirons de manière transparente face aux représentants de la société civile qui ont effectué ces importantes contributions pour que nous puissions aider les femmes d'autres pays. C'est la base de la relation stratégique que, de notre point de vue chez ONU Femmes, nous voulons continuer à maintenir avec l'Espagne et tous les autres donateurs.

Nous avons décidé d'avancer encore plus, et d'établir des objectifs tangibles et mesurables. Outre les priorités que nous avons soulignées, nous soumettons à l'examen du Conseil d'administration une proposition en vertu de laquelle chacune des priorités énumérées doit produire des résultats mesurables par rapport aux points-clés de nos évaluations pendant une période de six ans. A titre d'exemple, d'ici à fin 2017, nous devons réaliser une augmentation de 30% de la représentation des femmes au sein des parlements nationaux et des conseils municipaux, dans au moins 30% des pays dans lesquels des programmes des Nations Unies sont en place.

D'ici à 2017, au moins 20 pays supplémentaires - dans lesquels travaillent les Nations Unies - auront renforcé la protection sociale des femmes dans le secteur de l'emploi informel, notamment pour les femmes migrantes et les travailleurs domestiques.

Et je pourrais citer ici, bien qu'elles n'aient toujours pas été approuvées par le Conseil d'administration, environ 30 prestations avec des dates et des objectifs spécifiques, et qui sont fermement portées par un désir d'obtenir des résultats au niveau du renforcement des droits des femmes.

Dans le même temps, nous voulons obtenir des résultats significatifs dans la manière dont nous gérons notre travail interne, pour lequel nous avons renforcé nos capacités tout en nous attachant à nouer des partenariats plus étroits au sein du Système des Nations Unies, alors que nous cherchons à atteindre une plus grande cohésion et efficacité dans le travail commun de diverses agences.

Ce que nous voulons à tout prix éviter est le chevauchement des efforts ou une diminution, aussi minime soit-elle, de l'efficacité du travail du système pour promouvoir l'égalité des sexes et l'autonomisation de la femme.

Et cela me conduit à vous expliquer une des nouveautés d'ONU Femmes, relative cette fois mon poste de Secrétaire générale adjointe. Conformément à la résolution du 2 juillet 2010, nous avons aussi le rôle de contrôleur, pour assurer que les différentes agences prêtent attention et mettent en exergue, dans leurs sphères d'activité, l'égalité des sexes et l'autonomisation de la femme. Nous ne cherchons pas à être un groupe d'autodéfense, mais à être les défenseurs efficaces de l'égalité des sexes dans chaque agence.

Ce n'est pas un hasard si la création d'ONU Femmes est intégrée dans la résolution dont le titre est « cohérence du système dans son intégralité », car ONU Femmes est sans conteste la première réforme majeure du système des Nations Unies, dont l'objectif ultime est d'améliorer son efficacité et d'atteindre une plus grande cohérence et efficience dans son fonctionnement.

Nous nous félicitons que cela doive être la première grande réforme, car cela implique que de grands espoirs et d'immenses attentes sont placés dans notre organisation. Ces aspirations ont été exprimées par les gouvernements, les institutions et la société civile, car sans l'aide de toutes les parties prenantes, ce changement n'aurait pas été possible.

Et nous voulons que toutes ces parties prenantes continuent de nous soutenir. Avec les gouvernements présents au sein du Conseil d'administration, le dialogue s'avère extrêmement productif et je veux vous assurer que l'Espagne est un allié solide pour la mise en œuvre de cette nouvelle organisation. Nous voulons vous exprimer aujourd'hui, au sein du Parlement, notre gratitude officielle.

Nous avons également expliqué clairement les mécanismes de consultation avec la société civile afin d'élaborer notre Plan stratégique, et ici en Espagne, nous avons constaté la participation de nombreuses organisations avec lesquelles, au cours de ma visite, nous désirons communiquer et partager des informations sur les discussions actuelles et les adoptions de projets.

C'est dans ce contexte que nous voulons renouveler notre alliance stratégique avec l'Espagne. Nous ne voulons pas simplement nous soumettre à l'Accord stratégique qui a déjà été signé : nous voulons plutôt aller plus loin, en soulignant la nature véritablement universelle d'ONU Femmes en tant qu'institution.

L'Espagne est une référence au niveau des politiques publiques en faveur de l'égalité des sexes et de l'autonomisation de la femme. Il n'est pas surprenant que ce pays figure dans cette minorité de 28 pays où plus de 30% des membres du Parlement sont des femmes ; l'Espagne a des politiques publiques avancées sur l'élimination de la violence sexiste (bien que celle-ci soit un fléau mondial qu'il est difficile d'éradiquer) ; nous ne sommes pas non plus surpris de constater que la Loi sur l'égalité a permis de prendre des mesures importantes pour faire progresser l'autonomisation économique des femmes.

C'est pour cette raison que nous souhaiterions proposer aux différentes institutions compétentes que des actions soient prises, avec votre soutien, pour appuyer la création d'un Centre mondial du savoir sur les politiques publiques en faveur de l'égalité des sexes et de l'autonomisation de la femme. L'objectif ici doit être de recueillir des données sur ce que les diverses agences gouvernementales de l'Etat espagnol, depuis le Gouvernement espagnol jusqu'aux différentes communautés autonomes et autorités locales, font pour promouvoir l'égalité des sexes, et pour gérer la diffusion et l'échange d'expériences et de connaissances avec les autres administrations du monde.

Un centre mondial d'expertise situé en Espagne permettrait de générer un type de coopération et de collaboration avec le monde qui, sans aucun doute, établirait un précédent.

Je suis particulièrement consciente que beaucoup de décisions cruciales doivent toujours être prises, y compris en Espagne. De très nombreuses femmes se sentent oppressées, consacrant cinq heures par jour aux tches ménagères, contre même pas deux heures pour leurs compagnons. Assumer les responsabilités familiales et les tches domestiques, élever les enfants, ou prendre soin des personnes malades ou gées, devraient être une responsabilité partagée.

De nouvelles situations sociales réclament notre attention : en Espagne, 25% des grands-parents (ou devrait-on dire des grands-mères) prennent soin quotidiennement de leurs petits-enfants, et la question que nous devons nous poser en tant que société est de savoir si nous ne devrions pas les aider. Comment pouvons-nous continuer à faire des progrès de telle manière que la violence sexiste ne soit pas une fatalité, et dans le cas malheureux où celle-ci survienne, comment pouvons-nous apporter la protection et le soutien nécessaires aux victimes, des refuges, des soins familiaux, etc. ?

C'est pour cette raison que nous voulons collaborer avec les institutions, le gouvernement et également le Parlement. Comme je l'ai déjà proposé lors de l'Assemblée générale de l'Union interparlementaire il y a quelques mois à Panama, nous souhaiterions articuler un dialogue avec le Parlement au début de la session législative, et lancer une évaluation qui nous permette de déterminer la manière dont nous pouvons travailler ensemble pour autonomiser les femmes espagnoles dans leurs efforts visant à atteindre l'égalité des sexes.

Mesdames et Messieurs, membres du parlement, je souhaiterais conclure ces remarques comme je les ai commencées, en exprimant ma gratitude à la société espagnole dans son ensemble, par l'intermédiaire de tous les partis politiques, autorités et de la société civile, pour avoir apporté son appui indéfectible à la cause de la justice sociale et de la solidarité entre les sociétés et aidé à promouvoir une vie meilleure à travers le monde.

Merci de votre attention.