« Il faut renforcer l’estime de soi de ces femmes et les faire sentir appréciées pour leur identité, leurs connaissances et leur culture »

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9 août Journée Internationale des Peuples Autochtones

Myrna Cunningham, Présidente de l'Instance permanente sur les questions autochtones des Nations Unies.

Myrna Cunningham, lors du lancement du tout premier rapport de l'ONU sur les conditions de vie des peuples indigènes du monde (dont elle est une des auteures). (Photo : ONU/Paulo Filgueiras)

La Biographie de Myrna Cunningham est marquée par le mot « pionnière ». Elle a été le premier médecin de l'ethnie nicaraguayenne Miskitos et aussi la première femme gouverneur de sa région autonome. Elle fut également la première femme autochtone à recevoir le titre de Docteur Honoris Causa de l'Université autonome du Mexique.

Le 9 août, au siège des Nations Unies à New York, on célèbre la Journée internationale des peuples autochtones, sous le thème « Créations autochtones: célébration des légendes et cultures des peuples autochtones, préservation de notre avenir ». Les autochtones représentent 370 millions d'hommes et femmes, soit 5% de la population mondiale. Une proportion qui augmente lorsqu'on parle de pauvreté puisqu'ils représentent 15% des personnes les plus démunies, et environ un tiers des 900 millions de très pauvres vivant des les zones rurales. Myrna Cunningham nous parle des défis et des besoins des femmes autochtones.

Quelles particularités et les défauts des femmes autochtones qui distingue du reste de l'Amérique latine?

A la lutte pour leurs droits en tant que femmes, les femmes autochtones doivent ajouter la lutte engagée pour leurs besoins collectifs en tant que peuple. Une femme autochtone a droit à un accouchement sans danger, mais pour l'exercer le système de santé doit s'adapter aux particularismes de sa communauté. Les politiques publiques ne tiennent pas compte de ce double droit. Certains gouvernements font un effort pour intégrer cette perspective interculturelle, mais il y reste beaucoup à faire.

La corrélation entre pauvreté et peuples autochtones est un triste phénomène, et parmi les plus touchées sont les femmes. Quelles sont, selon vous, les racines de cette exclusion?

Les communautés autochtones possèdent une notion différente de la richesse du reste des hommes et des femmes. Ils ne l'entendent pas comme une accumulation d'argent, mais comme une relation harmonieuse avec la nature, et la possession de ressources pour survivre. Cela dit, la pauvreté existe dans certains endroits. Le modèle économique dominant a conduit les gens hors de leur territoire et la crise a accru cela, et d'autres menaces aussi. Deux facteurs ont un impact important sur la vie des femmes autochtones. D'un côté, l'utilisation des sols change et avec elle, l'alimentation. Les femmes sont celles qui fournissent la nourriture, et n'en trouvant pas, elles sont contraintes à la migration. D'un autre côté, l'augmentation de la violence économique se répercute sur leur vie spirituelle. Par exemple, le changement climatique a asséché beaucoup de rivières, alors que celles-ci sont un lieu traditionnel de rencontre et de résolution de conflit pour les femmes. Maintenant, elles n'ont plus cette zone de récréation culturelle.

Que proposez-vous pour favoriser l'émancipation économique des femmes autochtones?

S'attaquer aux problèmes structurels qui entravent son développement. Entre autres, l'un des plus remarquables est l'accès légal à leurs droits fonciers. Il faut allouer des ressources et financer des projets promus et mis en œuvre par des femmes. Il faut également approfondir leurs compétences par l'éducation.

Comment pensez-vous que l'on peut obtenir une plus grande représentation politique?

Grce à deux espaces: au sein du gouvernement traditionnel lui-même, en comptant plus de femmes dans les conseils d'anciens et parmi les juges communautaires, et dans les espaces des organisations de l'Etat, en ce qu'il faut renforcer l'estime de soi de ces femmes et les faire sentir appréciées pour leur identité, leurs connaissances et leur culture.

L'éducation est un moyen de parvenir à tout cela. Dites-nous quels projets développe l'Université interculturelle dont vous êtes la coordinatrice de la chaire itinérante.

L'université propose un diplôme de renforcement pour le leadership des femmes autochtones (en collaboration avec ONU Femmes), à travers lequel nous concevons un programme de formation complète destiné aux femmes: spiritualité, relations avec les Etats, droits des femmes, etc. Dans tous les cours nous essayons d'adopter une perspective basée sur le genre.

A l'heure actuelle, ONU Femmes promeut des programmes de développement axés sur les femmes indigènes partout dans le monde. En voici quelques uns.