Bénéficiant de revenus et de droits, des femmes vivant avec le VIH/Sida entament une nouvelle page dans des villages au Cambodge.

Plus de 1300 femmes vivant dans la pauvreté ont reçu une aide et des soins à domicile, une formation professionnelle et des subventions pour lancer leurs propres entreprises grâce au programme Fonds pour l'égalité des sexes (FES).

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« Je redoutais de vendre des produits aux gens de mon village », déclare Mom, 35 ans, mère célibataire de deux jeunes filles vivant dans le village de Norea Ten, dans la province de Svay Rieng, dans le sud-est du Cambodge. Mom, qui travaillait dans la préparation de Sra Sor, le vin khmer local, a dû cesser cette activité lorsqu'elle a été testée séropositive.

Elle se souvient de l'hostilité des villageoises et villageois, qui n'hésitaient pas à lui prendre ses produits tout en refusant de les payer, ce qui lui fit craindre pour sa sécurité et sa capacité à gagner sa vie.  

Mom s'occupe de ses porcs. Photo: CHEMS/CHEC/Mr. Sim Kalyan

D'après le Rapport d'une réunion technique régionale pour l'Asie entre ONUSIDA et ONU contre la féminisation du Sida, entre 1997 et 2006 la proportion des femmes vivant avec le VIH/Sida est passée de 38 à 52 pour cent. Cependant, cette tendance a été inversée depuis lors. En 2001, 44 pour cent des nouvelles infections ont frappé des femmes et il était attendu que ce taux continuerait de diminuer progressivement. Dans les zones rurales, la discrimination frappant les femmes vivant avec le sida et le VIH s’est aggravée par un manque d'éducation et de connaissance au sujet de l'épidémie. 

En 2010, deux ONG cambodgiennes, Cambodia Health Education Media Service (CHEMS) et Cambodian HIV/Aids Education and Care (CHEC), se sont associées pour élaborer un programme destiné à affronter les nombreux problèmes auxquels les femmes à faible revenu et vivant avec le VIH son confrontées dans les zones rurales du Cambodge. Ce programme de deux ans devait s'attaquer aux problèmes de ces femmes d'une manière globale, en renforçant leurs opportunités économiques, leurs compétences en leadership, et leur accès à des soins de santé. Il prévoyait aussi de mieux les informer sur les conséquences que peut avoir le VIH/sida non seulement pour elles mais aussi pour leurs familles. Ayant présenté des demandes de subvention, CHEMS et CHEC se virent accorder une subvention de la part du Fonds pour l'égalité des sexes (FES) d'ONU Femmes.

Désigné « Renforcer les moyens d'existence économiques des femmes à faible revenu et séropositives », ce programme a été mis en œuvre de 2011 à 2013 dans 12 provinces du Cambodge en proche partenariat avec des organisations à assise communautaire ainsi qu'avec le ministère cambodgien de l'Information, l'Autorité nationale pour le sida et le ministère de la Condition féminine dans le cadre de la stratégie quinquennale de lutte contre le VIH 2009-2013.

À ce jour, ce programmes a aidé plus de 1300 femmes, en leur offrant des formations professionnelles leur permettant d'assurer leurs moyens d'existence, des subventions pour lancer leurs propres entreprises, des conseil de santé ainsi qu’une aide et des soins de santé à domicile. Par ailleurs, au travers de rencontres de groupes d'entraide, ces femmes sont également devenues plus conscientes de leurs droits fondamentaux et ont développé des aptitudes à les défendre. 

Lorsque l'équipe de soutien à domicile du programme rendit visite à Mom en 2011, celle-ci n'avait aucune source de revenu pour subvenir aux besoins de ses deux filles. Mom ne tarda pas à s'inscrire à une formation en élevage porcin, car sa mère disposait d'un enclos inutilisé qu'elle pouvait emprunter. À l'issue de sa formation, Mom reçut une subvention de 100 dollars US. Elle s'en servit pour acheter deux pourceaux à 50 dollars et épargner le reste. Elle vendit le premier porc pour 375 dollars, ce qui lui permit d'étendre son exploitation et d'acheter quatre autres pourceaux. 

Aujourd'hui Mom se déclare contente de son activité et dispose du temps nécessaire pour s'occuper de ses filles. Elle prévoit de dépenser les bénéfices de sa prochaine vente de porcs à la construction d'une nouvelle maison afin que, le jour où arriveront les pluies, elle ne sera plus obligée de s'abriter dans la maison de sa mère. 

En s'attaquant au problème causé par la perte de moyens d'existence, l'un des grands facteurs qui contribuent à la pauvreté et à la vulnérabilité de femmes et de familles affectées par le VIH, ce programme financé par FES collabore avec des femmes pour construire un meilleur avenir pour des femmes comme Mom. 

Il ressort de l'évaluation finale du programme, achevée en mars 2013, que les bénéficiaires génèrent aujourd'hui davantage de revenus, sont décidées à poursuivre leurs activités et à les étendre, ont des familles mieux nourries et bénéficiant d'une meilleure sécurité alimentaire, et disposent de fonds pour financer la scolarité de leurs enfants.

En outre, l'enquête finale par l'Autorité nationale du sida au Cambodge[1] révèle un autre résultat encourageant : bien plus nombreuses sont les bénéficiaires du programme qui, à présent, sont en mesure d'envoyer leurs enfants à l'école, suite à la mise en œuvre de ce programme.

[1] Hor, B.L. & Ngin, Lina (2012). Enquête finale du projet de deux ans : « Renforcement des moyens d'existence économiques des femmes à faible revenu et séropositives. Cambodge : Autorité nationale du sida.