Les femmes Casques bleus prennent les commandes pour mettre fin à la violence basée sur le genre

En Inde, un projet pilote vise à former les officières militaires participant à des missions de maintien de la paix pour les aider à lutter contre la violence sexuelle et basée sur le genre.

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Quelques participants au cours de formation des forces de maintien de la paix posent pour une photo de groupe (de gauche à droite) : la majore Sarah Amir (Bangladesh) ; la majore Catherine Chacha (Kenya) ; la majore Chizu Kurita (Japon) ; la majore Berna Kayirangwa (Rwanda) ; la majore Florence Oloyede (Nigéria) ; le lieutenant général Maqsood Ahmed (Conseiller pour la branche militaire du Département des opérations de maintien de la paix des Nations Unies) ; la lieutenante-commandante Feyisara M. Solebo (Nigéria) ; la majore Fatuma A. Kaloya (Tanzanie) ; la capitaine Arnet Naija (Kenya) ; la majore Naranjagral Dashdondog (Mongolie). Photo : ONU Femmes / Sarabjeet Singh Dhillon

En partenariat avec le Centre du maintien de la paix des Nations Unies (CUNPK) en Inde, ONU Femmes a récemment lancé un projet pilote visant à former des officières militaires pour prévenir et aborder la violence sexuelle et bas sur le genre dans les conflits armés.

Cette nouvelle formation de deux semaines s’inspire des formations antérieures qui s’adressaient à l’ensemble du personnel de maintien de la paix, hommes et femmes. La Formation spéciale pour les officières militaires organisée récemment en Inde a réuni 32 officières militaires de 24 pays, notamment dans le but de résoudre l’importante pénurie de personnel militaire féminin dans les missions de maintien de la paix des Nations Unies à travers le monde.

« Dans le monde entier, toutes les forces armées sont majoritairement masculines et la plupart des chefs militaires sont des hommes. Les jeunes femmes qui envisagent de faire carrière dans l’armée peuvent se décourager, car il ne semble pas y avoir d’infrastructure en place pour les soutenir », observe la major Rachel Grimes de l’armée britannique.

Les participantes s’engagent dans une discussion de groupe (de gauche à droite) : la majore Himika Kalyani (Inde) ; la majore Florence Oloyede (Nigéria) ; la lieutenante-commandante Jennifer Macklin (Australie) ; la capitaine Sophie Sarchet (R-U) ; la majore Norashikin Awang (Malaisie) ; la capitaine Nora Terjeki Ignacz (Hongrie) ; la majore Sarah Amir (Bangladesh). Photo : ONU Femmes / Sarabjeet Singh Dhillon

La major Grimes a servi dans la Mission de l’ONU en République démocratique du Congo (MONUSCO) en tant qu’officière de planification du renseignement, puis également comme conseillère sur le terrain du Commandant de la force de l’ONU, pour la protection des enfants et les questions tenant compte du genre.

Bien que la participation des femmes dans le secteur de la sécurité ait été reconnue comme essentielle à la réussite des missions de maintien de la paix de l’ONU, les forces armées déployées dans des missions de maintien de la paix et dans des opérations militaires comptent très peu de femmes[1]. En moyenne, , et la majorité d’entre elles travaillent comme personnel de soutien administratif, plutôt que comme membre des missions de protection.

« Les formations de ce type contribueront à faire avancer la cause des femmes et à les aider à accéder aux échelons supérieurs pour remettre en question les stéréotypes et les préjugés qui limitent leur nombre et leurs rôles », explique Rebecca Reichmann Tavares, représentante du Bureau multipays d’ONU Femmes pour l’Inde, le Bhoutan, les Maldives et le Sri Lanka. Mme Tavares a également invité le Département des opérations de maintien de la paix de l’ONU à faire efficacement appel aux officières formées, car elles « représentent une ressource précieuse pour les opérations de paix de l’ONU ».

La lieutenante-colonelle Sofiya Qureshi présente les différents modules constituant le cours de formation. Photo : ONU Femmes / Sarabjeet Singh Dhillon

Au cours des quatre dernières années, ONU Femmes Inde s’est associée au CUNPK pour dispenser 26 cours aux Casques bleus de l’ONU –  femmes et hommes – sur la prévention de la violence sexuelle et basée sur le genre dans le cadre des formations préalables au déploiement. La Formation spéciale pour les officières militaires est la première à traiter de la protection contre la violence, mais aussi la première spécialement destinée aux femmes.

Cette formation devrait servir de modèle pour les centres nationaux de formation aux opérations de maintien de la paix dans tous les pays qui fournissent des contingents aux missions de paix des Nations Unies. Elle vise également à établir une réserve minimum d’officières militaires prêtes à être déployées dans les missions de l’ONU. Au total, 100 officières dans le monde doivent suivre la formation au cours de la première année.

La formation technique de dix  jours comprenait des ateliers sur un éventail de compétences telles que les techniques de communication avec les survivants, les signes précurseurs des violences sexuelles liées aux conflits, le recueil de renseignements pour l’identification des risques, des menaces et des vulnérabilités, les connaissances en matière de protection des enfants, et le maintien de la paix sensible au genre.

Cérémonie de clôture - Au premier rang (de gauche à droite) : la majore Florence Oloyede (Nigéria) ; la colonelle Kalyani Addya (Inde) ; la majore Norashikin Awang (Malaisie) ; au second rang (de gauche à droite) : la majore NS Thys (Afrique du Sud) en partie cachée ; la commandante Yada Thiemthip (Thaïlande) ; la capitaine Merina Acharya (Inde) ; la capitaine Pooja Karki (Népal).Photo : ONU Femmes / Sarabjeet Singh Dhillon

Cette formation comprenait des composantes axées sur l’instruction tactique – par exemple, la détection des signes précurseurs de l’imminence d’un conflit, comme l’augmentation des niveaux de violence conjugale ou la déscolarisation des adolescentes. L’entraînement opérationnel portait notamment sur l’importance des patrouilles de nuit. Il a été démontré que la présence de personnel féminin de maintien de la paix dans les marchés et les endroits où les femmes ramassent du bois de chauffage contribue à prévenir les cas de violence sexuelle et de violence fondée sur le genre. On sait aussi que le nombre de signalements sur les violences sexuelles liées aux conflits augmente lorsque des femmes participent aux missions de paix.

La formation de deux semaines prêtait une attention particulière à la prévention des violations des droits de la femme et à la lutte contre celles-ci, notamment à travers un module fondé sur des scénarios sur la violence sexuelle dans les conflits armés. Des vidéos, des photos, des histoires et des témoignages relevés lors des missions ont été utilisés. Ce module était axé sur la détection, le signalement, la prévention et la lutte contre la violence sexuelle. Depuis 2011, plus de 1 000 Casques bleus ont suivi cette formation dans 18 pays.

« Cette formation est très importante pour les officières militaires, » explique la major Ivana Mara Ferreira Costa de la section d’appui militaire brésilienne pour les missions de l’ONU. « Non seulement nous recyclons tout notre savoir depuis le terrain mais...ça nous a ouvert l’esprit vers le futur en terme de l’inclusion féminine dans les opérations de maintien de paix. Cette formation nous permet de nous familiariser avec des situations de terrain dont nous n’avions pas connaissance. »

Le Lt. Gén. Maqsood Ahmed, conseiller militaire du Département des opérations de maintien de la paix de l’ONU, prononce un discours lors de la cérémonie de clôture d’une formation pour les Casques bleus féminins dispensée en Inde. Participants (de gauche à droite) : Maj. Gén. (Ret) Patrick Cammaert, mentor du cours ; Rebecca Reichmann Tavares, ONU Femmes ; Lt. Gén. Philip Campose, chef adjoint, armée indienne ; et Munu Mahawar, département des Affaires étrangères. Photo : ONU Femmes/Sarabjeet Singh Dhillon

ONU Femmes espère que cette formation sera adoptée par les établissements nationaux et régionaux de formation aux opérations de maintien de la paix dans le monde entier. Compte tenu du succès du projet pilote mené à New Delhi en mars et en avril 2015, une deuxième formation sera dispensée en Afrique du Sud en septembre 2015.

Cette formation devrait également encourager les gouvernements des pays qui fournissent des contingents à inclure plus d’expertes militaires dans les missions de maintien de la paix de l’ONU.

« Les mandats de l’ONU comprennent la lourde responsabilité de la protection de la population civile. Alors que les femmes représentent 50 pour cent de la population civile, toute approche sans personnel féminin ne peut être considérée comme une approche intégrée », explique le Lt. Gén. Maqsood Ahmed, conseiller militaire au Département des opérations de maintien de la paix de l’ONU.

Cliquez ici pour consulter une vidéo (en anglais) sur la Formation spéciale.

Cliquez ici pour consulter une vidéo (en anglais) de l’entretien avec le General de division Patrick Cammaert, qui a présenté cette formation.

[1] Selon des données datant d’avril 2015, on compte 2 840 femmes et et observatrices militaires sur un total de 94 620 membres déployés dans les missions de maintien de la paix de l’ONU (ce qui correspond à trois pour cent).