Cinq réussites marquantes du Programme d’action de Beijing

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Participants at the Non-Governmental Organizations Forum meeting held in Huairou, China, as part of the United Nations Fourth World Conference on Women held in Beijing, China on 4-15 september 1995. UN Photo/Milton Grant
Photo: UN Photo/Milton Grant

Il y a vingt-cinq ans, à Beijing en Chine, le monde a fait une promesse : instaurer l’égalité des droits et des chances pour toutes les femmes et toutes les filles, partout dans le monde.

C’était en 1995, à l’occasion de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes ; plus de 30 000 militants et représentants de 189 pays s’étaient réunis afin de débattre des mesures à prendre pour assurer l’égalité des sexes. Ensemble, ils ont élaboré la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, qui reste à ce jour le programme le plus complet s’agissant de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes.

Celui-ci traitait de questions mondiales, qui sont toujours d’actualité, et étudiait leur incidence sur les femmes et les filles. Parmi ces questions figuraient la pauvreté, l’environnement, la violence à l’égard des femmes, l’éducation des filles, la participation égale des femmes sur le marché du travail, notamment dans les emplois hautement qualifiés, les industries STIM et les postes de direction. Il visait également à promouvoir la répartition équitable des travaux rémunérés et des responsabilités domestiques entre les femmes et les hommes, et bien plus encore.

Le Programme d’action de Beijing a marqué un tournant dans la manière dont le monde appréhende les droits des femmes et des filles, et il a entraîné une prise de conscience collective du fait que la réalisation du plein potentiel des femmes et des filles est essentielle au succès du développement durable.

Depuis 1995, le Programme d’action de Beijing est devenu une référence pour les travaux en faveur de l’égalité des sexes dans le monde. Mais si vous vous demandez ce qui a vraiment changé et pourquoi il reste encore aujourd’hui important pour les femmes et les filles, voici cinq de ses grands succès s’agissant de la situation des femmes et des filles partout dans le monde.

Amélioration des droits des filles

Students concentrate during their remedial education classes at the ‘Oasis Center for Resilience and Empowerment of Women and Girls’ operated by UN Women in the Za’atari refugee camp in Jordan. Photo: UN Women/Christopher Herwig
Photo: ONU Femmes/Christopher Herwig

Les filles : Le Programme d’action de Beijing a été le premier document politique mondial sur les femmes à s’intéresser tout particulièrement à la fille. Bien sûr, les droits de l’enfant sont inscrits dans la Convention relative aux droits de l’enfant, entrée en vigueur en septembre 1990, mais le Programme d’action de Beijing concernait spécifiquement les droits des jeunes filles et des filles.

 Partout, je vois les garçons bénéficier d’un traitement différent de celui des filles... Je suis forte et je travaille dur, pourtant on emploie des mots très différents pour me décrire : ’faible’, ’fragile’, ’tendre’ ».

Anna Lavreniuk

 

Il dénonçait clairement le fait que les filles sont victimes de discriminations dès leur plus jeune âge puis tout au long de l’enfance, et il appelait à protéger tout particulièrement leurs droits.

Par exemple, le Programme d’action de Beijing encourageait l’éducation des filles, donnant ainsi à cette problématique une impulsion soutenue depuis 25 ans. Il soulignait non seulement l’importance de l’enseignement primaire, mais prenait également de l’avance sur son temps en appelant à améliorer l’éducation des filles à des niveaux supérieurs ainsi que leur accès aux études STIM.

Globally, child marriage has gradually declined since 1995 from 1 in 4 to approximately 1 in 5

Toutefois, sa vision de l’éducation des filles ne s’arrêtait pas à leur scolarisation, puisque le Programme d’action de Beijing proposait en outre des mesures favorisant leur maintien à l’école, par exemple l’éradication des mutilations génitales féminines et du mariage des enfants, deux pratiques néfastes empêchant des millions de filles de terminer leurs études.

Grâce aux efforts constants menés dans ce domaine depuis plus de deux décennies, les filles scolarisées sont plus nombreuses que jamais et beaucoup de pays ont atteint la parité entre les sexes dans l’éducation. Cependant, les disparités entre les sexes dans les domaines des STIM restent problématiques aujourd’hui : seulement 35 pour cent de tous les étudiants suivant des études liées aux STIM sont des femmes, et seulement 30 pour cent des chercheurs dans le monde sont des femmes.

L’amélioration des niveaux d’éducation chez les femmes et les filles ne s’est pas traduite par une réduction de la ségrégation professionnelle, ce qui complique la réduction de l’écart salarial entre les hommes et les femmes.

Dans certaines régions, on a tenté de retirer l’éducation sexuelle complète des programmes scolaires et de limiter les études de genre dans l’enseignement supérieur.

L’enseignement est essentiel, mais il est également crucial de veiller à ce que des études variées soient disponibles, accessibles et abordables pour les femmes et les filles.

Tenir compte des questions de genre dans tous les programmes et politiques

A woman and young child commuting via ferry, Thailand. Photo: UN Women/Pathumporn Thongking
Photo: ONU Femmes/Pathumporn Thongking

L’optique de genre : Dans les politiques publiques à travers le monde et dans les couloirs des Nations Unies, le terme « intégration du genre » est partout, mais il ne passe pas bien en dehors de ces espaces. Qu’est-ce que cela signifie, et pourquoi est-il essentiel que le Programme d’action de Beijing ait adopté l’intégration du genre comme outil de promotion de l’égalité des sexes ?

L’intégration du genre désigne la prise en compte systématique des besoins et des droits des hommes et des femmes dans tous les programmes, politiques, stratégies et recherches, entre autres domaines. En raison de préjugés sexistes existant depuis longtemps, certains cachés et d’autres bien visibles, les décisions politiques peuvent en fait accroître les inégalités si l’on ne tient pas compte des implications sexospécifiques.

  Nos mères n’avaient pas de serviettes hygiéniques ! Il s’agit de la réponse courante de certains législateurs, lorsqu’on leur demande de mettre des serviettes hygiéniques à disposition des filles dans les écoles, dans le cadre d’une budgétisation tenant compte des questions de genre. Cette réponse est stupéfiante... La fourniture de serviettes hygiéniques à l’école est une idée qui continue à étonner les décideurs travaillant sur une budgétisation sensible aux questions de genre. »

Patricia Munabi

 

Imaginez-vous, par exemple, en tant que fille ou jeune femme grandissant dans une zone rurale. Une nouvelle école est construite dans votre village, mais pour vous rendre en classe, il vous faut parcourir une distance importante à pied. Vous aurez donc moins de temps pour vous acquitter des tâches ménagères, une charge qui vous incombe davantage qu’à vos frères en raison des rôles traditionnellement assignés à chacun des sexes. Lors de votre trajet quotidien à travers le village, vous êtes plus susceptible de subir du harcèlement ou des violences. En période de règles, vous risquez également de devoir manquer l’école, parce qu’il n’y a pas de toilettes séparées pour les filles et les femmes, ainsi que parce que vous n’avez pas les moyens d’acheter des produits d’hygiène menstruelle.

Alors que l’école est supposée bénéficier à tous les jeunes, elle profite plus aux garçons qu’aux filles, car les expériences vécues par ces dernières ainsi que les défis auxquels elles se heurtent ne sont pas pris en compte.

À moins de mettre en place des outils tenant compte de la complexité des questions de genre, les politiques et les actions risquent de creuser encore davantage le fossé entre les sexes plutôt que de le combler. Et c’est là qu’intervient l’« intégration des sexes » — il s’agit d’une stratégie qui vise à analyser les politiques et les actions, à poser des questions pertinentes et à rassembler des données illustrant les expériences des femmes et des filles ainsi qu’à s’assurer que les interventions répondent aux besoins des femmes et des hommes de façon équitable et non seulement n’exacerbent pas les inégalités entre les sexes, mais contribuent activement à les éliminer.

Le Programme d’action de Beijing s’est imposé comme le premier cadre politique mondial faisant de l’intégration des sexes une stratégie clé capable d’instaurer l’égalité des sexes. Son caractère essentiel a été mis en évidence dans l’appel aux gouvernements et aux autres acteurs à l’appliquer à tous les programmes et politiques.

Faire progresser la lutte contre la violence à l’égard des femmes

Activists, social leaders, organizations, women and men gather in El Ejido Park in Quito Ecuador to participate in the "Vivas nos Queremos” march protesting violence against women and girls. Photo: UN Women/Johis Alarcón
Photo: ONU Femmes/Johis Alarcón

Une vie exempte de violence : La Quatrième Conférence mondiale sur les femmes à Beijing, qui rassemblait de nombreux acteurs du mouvement pour les droits des femmes, a attiré l’attention sur les droits fondamentaux des femmes en octroyant une visibilité sans précédent à ces questions.

Le Programme d’action de Beijing a appelé à la ratification de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF), adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1979 et plus communément appelée « Déclaration des droits des femmes », et a encouragé l’élaboration d’un protocole facultatif à la CEDEF. Finalisé en 1999, celui-ci a permis aux individus, aux groupes d’individus et aux ONG de déposer des plaintes pour violation de leurs droits personnels (?) / individuels (?) protégés par la Convention — une étape importante en vue d’obtenir justice et réparation.

Axé sur les droits fondamentaux, le Programme d’action de Beijing défendait le concept, pour les femmes, de la pleine jouissance de leurs droits, y compris à une vie exempte de violencebasée sur le genre. Il s’agissait là du premier cadre international traitant de la violence à l’égard des femmes de manière exhaustive et présentant la prévention comme stratégie clé, ainsi que la transformation des normes sociales comme domaine de travail spécifique.

Les droits de l’homme sont les droits des femmes et les droits des femmes sont des droits de l’homme »

— Hillary Rodham Clinton

 

Il a même prévu un appel à l’élaboration de stratégies ciblées pour lutter contre le harcèlement sexuel entre autres sur le lieu de travail et dans les établissements d’enseignement, une problématique qui a suscité l’indignation du monde entier au cours des dernières années et que des campagnes telles que #MeToo, #TimesUp, #Niunamenos, #NotOneMore, #BalanceTonPorc, etc., ont propulsée sur le devant de la scène.

Suite à l’adoption du Programme d’action de Beijing, un nombre croissant de pays ont mis en place des lois pour éliminer la violence à l’égard des femmes depuis 1995, mais des données récentes révèlent que cette violence persiste : au cours de l’année écoulée, près d’une femme sur cinq a été confrontée à la violence, aux mains d’un partenaire intime ; les nouvelles technologies favorisent de nouvelles formes de violence, comme le harcèlement en ligne, pour lesquelles les recours restent limités, voire inexistants.

La violence à l’égard des femmes demeurant une question parmi les plus importantes de notre époque, nous devrons continuer à encourager les initiatives de prévention et l’action mondiale coordonnée jusqu’à ce qu’elle soit éliminée.

Renforcer le leadership des femmes en matière de conservation et d’action climatique

In Guinea, Through a grant from UN Women’s Fund for Gender Equality, PREM has helped rural women form several cooperatives and taught its members how to plant a vitamin-rich tree called Moringa and how to clean, dry and sell its leaves with the help of solar technology. Used as medicine or a dietary supplement by societies around the world, Moringa also supports biodiversity and prevents soil erosion. Photo: UN Women/Joe Saad
Photo: ONU Femmes/Joe Saad

Les femmes qui protègent notre planète : S’appuyant sur les grandes réussites des années 1990 en matière de leadership environnemental, le Programme d’action de Beijing a accru l’attention accordée à la question du leadership environnemental des femmes, en mettant en évidence le fait que leur participation pleine et équitable favorisait l’amélioration de la gouvernance et des résultats de conservation.

La lutte pour la justice sociale est indissociable de celle en faveur de la durabilité environnementale. Les personnes les plus pauvres, notamment les femmes autochtones rurales, sont les plus touchées par les catastrophes naturelles. »

Maria Alejandra (Majandra) Rodriguez Acha

Le Programme d’action a reconnu les rôles essentiels et uniques que jouent les femmes et les filles dans le domaine environnemental en tant que détentrices de savoirs, coordonnatrices, productrices, aides et éducatrices. Il s’est, entre autres, engagé à permettre aux femmes, y compris autochtones, de participer à la prise de décisions environnementales à tous les niveaux, à atténuer les conséquences pour les femmes des risques environnementaux et à assurer l’accès pour tous à l’eau potable d’ici l’an 2000.

Around the world, 13 million young people in over 200 countries and territories have taken part in 89,000 climate action protests.

S’agissant des progrès accomplis, il est indéniable que la participation des femmes à la prise de décisions liées au climat a augmenté au cours des dernières années, mais elle est loin d’être paritaire. Par ailleurs, en 2017, seulement 71 pour cent de la population mondiale avait accès à l’eau potable. La crise climatique touche ceux qui ont un accès limité à la terre, aux ressources ou aux moyens de subvenir à leurs besoins. À l’échelle mondiale, seulement 14 pour cent des propriétaires agricoles sont des femmes.

Il n’a jamais été aussi crucial de veiller à ce que les expériences, les connaissances et le leadership des femmes et des filles soient pris en compte dans l’action climatique.

Face aux défis sociaux, économiques et environnementaux interdépendants, il est essentiel de réaliser l’engagement du Programme d’action de Beijing pour ce qui concerne l’établissement d’un rapport durable avec l’environnement, qui bénéficie à tous, y compris les femmes et les filles.

Libérer le pouvoir du leadership des femmes

Laura Bosnea, 28, was elected to the local council in Râșcani City in 2015, as one of the first Roma women councillors in Moldova. Before running, she attended several campaign and leadership trainings provided by UN Women, funded by the Government of Sweden. Photo: UN Programme “Women in Politics”
Photo: UN Programme “Women in Politics”

Les femmes sont des leaders mondiaux : À la conférence de Beijing, la perspective de faire progresser les droits des femmes a suscité un enthousiasme évident. Des milliers de femmes du monde entier, dont les voix ne sont pas souvent entendues lors des réunions internationales, ont participé à cette conférence. Celle-ci a rassemblé des militants qui travaillent depuis plusieurs décennies pour les droits des femmes ainsi que de jeunes leaders ayant récemment rejoint le mouvement.

L’ampleur de l’événement, auquel ont participé 30 000 militants venant du monde entier ainsi que les représentants de 189 gouvernements, illustre le potentiel considérable du leadership des femmes. Parvenir à fusionner toutes les expériences et perspectives, malgré leur diversité, dans le Programme d’action de Beijing, qui a porté l’engagement en faveur de l’égalité des sexes jusqu’au XXIe siècle, constitue une réussite majeure. De nos jours, le Programme d’action continue à proposer des stratégies visant à atteindre l’égalité des sexes.

Since 1995, the number of women parliamentarians around the world has more than doubled to 25%

Le Programme d’action de Beijing a constitué un premier pas vers l’adoption de quotas de genre en matière de leadership politique, en particulier en Amérique latine et en Afrique australe, où les transitions politiques des années 1990 ont été autant d’occasions d’améliorer la situation en matière d’égalité des sexes. Le Programme d’action a également encouragé les initiatives visant à améliorer les données relatives à la représentation politique des femmes, par exemple les travaux de suivi du nombre de femmes dans les parlements nationaux menés par l’Union interparlementaire, dont les archives remontent à 1997.

La proportion de femmes au parlement adoublé depuis 1995, et les cabinets de nombreux pays sont désormais équilibrés. Les engagements en faveur de la parité entre les sexes dans toutes les branches et à tous les niveaux de gouvernement ainsi qu’en matière de leadership demeurent toutefois extrêmement rares.

Le Programme d’action de Beijing a également fait de l’instauration de la parité entre les sexes au sein du système des Nations Unies une priorité. Si les Nations Unies s’étaient déjà engagées auparavant à garantir une répartition paritaire des postes en son Siège, le Programme d’action de Beijing a appelé à veiller à ce que les femmes occupent 50 pour cent des postes de direction et de prise de décisions à l’ONU avant l’an 2000.

Selon les données les plus récentes, 44,2 pour cent du personnel professionnel et supérieur sont des femmes, ce qui représente une hausse par rapport aux 32,6 pour cent enregistrés en 1995.

Conscient du travail qu’il reste à faire, le Secrétaire général de l’ONU a lancé en 2017 la Stratégie sur la parité entre les sexes à l’échelle du système des Nations Unies et a montré l’exemple en atteignant la parité aux niveaux les plus élevés de l’organisation. En 2019, ONU Femmes a formulé des Lignes directrices pour la création d’un environnement propice et des orientations complémentaires, proposant des mesures et bonnes pratiques concrètes visant à l’instauration de la parité entre les sexes à l’ONU.

Au sein de l’ONU et au-delà, la volonté de réaliser les droits des femmes concrétisée par le Programme d’action de Beijing continue encore aujourd’hui d’inspirer le militantisme pour l’égalité des sexes.

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