Dans les paroles de Johanna Tantria T. Wardham : « Les inégalités entre les sexes naissent à la maison »

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Johanna Tantria T. Wardham. Photo: ONU Femmes/Ryan Brown
Johanna Tantria T. Wardham. Photo: ONU Femmes/Ryan Brown

Passionnée et débordante d’énergie, Johanna Tantria T. Wardham est connue de tous sous le nom de « Jo ». Figure très familière dans les bidonvilles urbains de Jakarta, on la trouve souvent dans le quartier de Prumpung et d’autres, en périphérie de la capitale très animée de l’Indonésie. Elle s’est donné pour mission d’établir, à partir de rien, une culture de l’égalité des sexes. Elle organise des discussions au niveau communautaire et des formations sur la prévention de la violence à l’égard des femmes et des filles, et réalise des audits de genre. Cependant, parallèlement à toutes ces initiatives, elle est surtout devenue une personne de RÉFÉRENCE pour la communauté. Jo fait partie du personnel de l’ONG Kalyanamitra, partenaire d’ONU Femmes dans le cadre du programme pilote « Des villes sûres » mené en Indonésie. La région de Prumpung ainsi que deux autres sites ont été sélectionnés pour cette initiative, en raison de la prévalence élevée des cas de violence dans ces quartiers, y compris de la violence basée sur le genre. Selon la Commission nationale des femmes, plus de 250 000 cas de violence à l’égard des femmes et des filles ont été enregistrés en Indonésie pour l’année 2016. Aujourd’hui, Jo inspire non seulement les personnes avec qui elle travaille, mais aussi ses nombreux étudiants, à s’impliquer dans la communauté.

« Je suis diplômée de la faculté de droit et, même lorsque j’étais étudiante à l’université, je m’impliquais déjà beaucoup dans l’activisme étudiant. J’ai toujours su que je devais transmettre mes connaissances à un grand nombre de personnes. Je viens d’une famille de villageois. Mon père était fonctionnaire. Il y avait beaucoup de pauvres dans les environs. J’ai le sentiment qu’il m’incombe de transmettre mes connaissances aux autres, car c’est le message que mon défunt père m’a toujours communiqué.

Les inégalités entre les sexes naissent à la maison avec la répartition inégale des tâches ménagères, ce qui engendre une violence à l’égard des femmes sous toutes ses formes... surtout la violence fondée sur le genre. Je suis souvent confrontée à ce type de problème dans les quartiers où je travaille. Je pense que l’égalité des sexes devrait commencer au sein de la famille.

J’ai eu de la chance... Dans ma famille, ma mère et mon père montraient l’exemple au reste du quartier : mon père ne faisait pas de distinction entre le travail des femmes et le travail des hommes. Tous les jours, il lavait les sols et faisait la vaisselle. Le dimanche, mes parents faisaient la lessive ensemble. Nous sommes une famille catholique, et les voisins étaient aussi ravis de voir que mon père pouvait tout faire.

Quand j’ai choisi de faire ce métier, j’avais pleinement conscience qu’il ne s’agirait pas d’un travail facile, que ce serait dur et complexe, car mon rôle consiste à changer les paradigmes qui sont ancrés dans la culture de la communauté. Ici, non seulement les femmes sont confrontées à des valeurs patriarcales et au système capitaliste, mais elles sont aussi touchées par la pauvreté – il s’agit là de notre réalité. Il existe tellement d’ONG qui cherchent à remédier au problème des inégalités entre les sexes. Nous menons des campagnes et des discussions, nous sensibilisons les communautés et nous nous occupons de cas particuliers. Il y a tant d’autres ONG qui ont déjà pris de telles initiatives. Cependant, pour moi, il s’agit avant tout de développer une conscience critique au sein de la communauté. Il est très important d’éveiller le sens critique des groupes communautaires et de soutenir le changement au niveau culturel et au sein du système qui marginalise les femmes.

Dans cette communauté, le problème principal auquel les femmes doivent faire face reste les inégalités entre les sexes : les inégalités dans leurs relations au sein du foyer, la répartition inégale des tâches ménagères, la violence domestique et même une violence sexuelle à l’égard des femmes et des filles.

Je souhaite voir une amélioration des relations au sein de la famille. Les rôles de genre normalisés ne devraient pas s’appliquer de façon stricte dans la famille. À la maison, les hommes et les femmes devraient travailler ensemble. Cette collaboration s’avère essentielle pour prévenir la violence sexuelle dans la famille.

Je garde espoir lorsque des femmes de la communauté me disent par exemple : « mon mari veut faire la lessive, il m’aide à préparer le dîner ». De tels témoignages montrent que rien n’est impossible. Le changement est possible !

Je dis toujours à mes étudiants au campus ou dans les universités qu’ils ne devraient pas seulement songer à réussir leurs examens, à trouver un emploi et à gagner leur vie. Je les encourage à se soucier des autres et à leur accorder un peu d’attention. Il ne s’agit pas de résoudre tous les problèmes, mais simplement de soutenir les personnes qui ne bénéficient pas nécessairement d’autant d’avantages que nous et de leur laisser entrevoir une lueur d’espoir ».

Indonesia - Safe Cities Project Jakarta